Révélé cette semaine par Olivier Dauvers aux « pros » de la distribution, le test de Casino pour majorer ses prix le dimanche a été relayé massivement dans la presse grand public, avec des conséquences sans doute désastreuses pour son image-prix qui était déjà au plus bas.
Le choix risqué d’être le pionnier
Tous les distributeurs en rêvaient, Casino l’a fait. Le « yield management« , qui permet de faire varier ses prix en fonction du moment de la journée, de l’offre et de la demande, voire même du profil du consommateur concerné, est le graal de toutes les équipes pricing, en théorie en tout cas.
Largement pratiqué par les géants du e-commerce, mais surtout démocratisé par les acteurs du transport, qui ont réussi à l’imposer comme une habitude auprès des consommateurs, ce pricing dynamique n’avait encore jamais été testé par les distributeurs alimentaires.
Dans ce test lancé très discrètement, Casino a fait le choix de majorer ses prix dans ses magasins le dimanche, sur des niveaux élevés (environ +15% au global mais jusqu’à 36% sur certaines références). Cette majoration, qui vient s’ajouter à des niveaux de prix déjà très élevés, ne pouvait pas passer inaperçue.
Un « parti-prix » difficilement compréhensible pour les clients
Suite aux révélations d’Olivier Dauvers dans Vigie Grande Conso puis sur son blog, la presse nationale et régionale a rapidement relayé cette information. En quelques heures, cette information est donc devenue « grand public » avec tous les risques que cela comporte.
Au vu de l’inflation galopante depuis un an, particulièrement sur les produits alimentaires (+12,6% en décembre selon IRI), le sujet des prix dans les magasins est particulièrement sensible. La révélation de ce test peut donc être perçue comme une volonté de l’enseigne de se « faire du gras » sur le dos de ses clients.
Ce choix est d’autant plus risqué que les enseignes de Casino (Hyper Frais (ex-Géant), Casino Supermarché, Monoprix, Franprix) sont déjà en queue de peloton dans toutes les études d’image-prix.
Du côté de l’intérêt économique pour l’enseigne, il n’y a aucun doute : le pricing dynamique permet d’augmenter ses marges et c’est sûrement ce qui a motivé Casino. L’enseigne a d’ailleurs assumé son choix et s’est justifiée en avançant l’argument un peu bancal que l’enseigne apporte « un confort supplémentaire au consommateur« en restant ouvert le dimanche toute la journée. Les ouvertures étant désormais généralisées le dimanche matin, pas sûr que les clients soient prêts à débourser plus pour s’y rendre l’après-midi, surtout que les magasins offrent une expérience d’achat dégradée à ce moment là (pas de vente d’alcool, caisses automatiques uniquement, fermeture des rayons trad…).
Interrogées par la rédaction d’actu.fr (qui relaie l’actualité de 88 hebdomadaires locaux), toutes les enseignes concurrentes ont d’ailleurs nié en bloc avoir recours à ce genre de pratiques. « On préfère proposer à nos clients les prix les plus justes, tout le temps. » indique le porte-parole de Système U, tandis qu’Auchan s’interroge : « Nos clients du soir et/ou ceux du dimanche matin sont souvent des clients qui ne peuvent pas faire leurs courses à un autre moment, pourquoi leur faire payer plus cher que les autres ?«
Suite à la parution de ces articles, Casino a finalement annoncé revenir en arrière et ne plus pratiquer de pricing dynamique le dimanche, mais son image aura été durablement écornée.
Casino a brisé un tabou, et le secteur de la distribution peut s’en féliciter. Par contre, en étant très gourmande sur les hausses de prix pratiquées et avec un timing maladroit au vu de l’inflation dans les rayons, l’enseigne stéphanoise a rendu le sujet explosif auprès du grand public et il y a fort à parier que les distributeurs français ne s’y risqueront pas de sitôt.
Il n'y a aucun commentaire
Ajoutez le vôtre