En apparence tout semble normal. Sur le site Pixmania, les soldes s’affichent en page d’accueil, avec des prix « pulvérisés » : un iPhone 5c à 299 euros, un matelas Dunlopillo à 167 euros… En y regardant bien on remarque pourtant vite que les rayons sont considérablement dégarnis. En électroménager, par exemple, ne subsistent que 17 produits dont la moitié de recharges de brosses à dents électriques. Mais il est encore bel et bien possible de passer commande via le site. Hélas, comme le rapporte un article du blog SOS Conso, sur Le Monde, les plaintes de clients lésés n’ayant jamais reçu leur colis se multiplient auprès de l’association Net-Litiges. Exemple de « Le Gaulois », le 28 janvier :
« J’ai passé commande sur Pixmania (par le vendeur ELITGSM) pour un Samsung Galaxy A300, et après de nombreux mails et contact téléphonique. J’apprend que Pixmania est placé en redressement judiciaire. Ils me demande de contacter ma banque pour faire opposition, mais le délai des 7 jours est dépasser depuis longtemps, car on m’a laisser croire que le remboursement était en cours jusqu’à ce que je reçois un mail de Pixmania qui m’apprend qu’ils sont dans l’incapacité de me remboursé. » [Les fautes d’orthographe sont celles du message d’origine]
En théorie, les clients débités mais non livrés peuvent donc faire opposition auprès de leur banque en présentant le certificat du tribunal de commerce attestant le redressement judiciaire du site [officiellement enregistré le 14 janvier 2016]. Sauf que ce dernier se garde bien d’avertir les internautes : aucune mise ne garde n’est visible sur le site.
La longue descente aux enfers d’un pionnier de l’e-commerce
Triste fin pour un site qui faisait pourtant partie des fleurons de l’e-commerce il y a encore quelques années. Spécialisé, à son lancement en 2000, dans la vente d’appareils photo numériques, Pixmania s’était diversifié dans tous les produits grand public et avait ouvert sa Marketplace en 2008. En juin 2011, il s’était associé avec Carrefour dans les produits non-alimentaires. A son apogée en 2010, le site comptait 1500 salariés, 10 millions de clients et 806 millions d’euros de chiffre d’affaires. Aujourd’hui, après deux plans sociaux, le groupe est en lambeaux, avec moins de 300 salariés et un chiffre d’affaires divisé par quatre (200 millions d’euros en 2014).
A l’instar de Surcouf, le groupe met en cause la concurrence féroce des géants du web comme Amazon et la guerre des prix qui fait rage dans le secteur high tech. Un argument recevable mais qui n’explique pas totalement son échec. Sa diversification à outrance a dilué son image de marque et son déploiement géographique a été trop rapide. L’ouverture de magasins physiques, qui devait représenter en 2017 la moitié des ventes, se révèle être un gouffre financier. Enfin, le passage de mains en mains par les fonds d’investissement, les revirements stratégiques à 180 degrés et les « plans de reconquête » ratés ont précipité la chute. L’ultime tentative de l’actuel propriétaire, le fonds allemand Mutares, qui avait racheté le site GrosBill à Auchan en 2015 pour le fusionner avec Pixmania, a elle aussi échoué.
Carrefour n’a lui pas pleuré bien longtemps sur les ruines de l’e-commerçant et a mis la main en 2015 sur Rueducommerce, rival direct de Pixmania. En espérant sans doute un meilleur sort pour ce nouveau trophée. Quand à Pixmania, le tribunal de commerce de Nanterre doit rendre le 5 février sa décision concernant le redressement judiciaire. Deux repreneurs, Vente-du-diable.com et Astry se sont fait connaître.