Une petite révolution se trame, et l’eau de coco en est le déclencheur. La catégorie explose en France (+50% vs 2014) et le marché bouge. Décryptage.
Certains nutritionnistes présentent l’eau de coco comme une boisson fonctionnelle et naturelle particulièrement adaptée après l’effort pour éviter les crampes, ou à boire au quotidien pour renforcer ses défenses naturelles… mais concrètement, passé le blabla marketing, elle n’est référencée pour le moment que dans une faible partie du territoire, et principalement en Ile-de-France.
Un produit encore mal compris
Alors, l’eau de coco : véritable phénomène ou mode éphémère de bobo parisien ? Pas si évident. « Le défi aujourd’hui c’est de se faire connaitre, de se faire comprendre. En France, seulement 38% de la population connait cette boisson. Ca reste un phénomène très parisien, confie Andy Kay, DG France & Benelux de Vitacoco. Beaucoup de nos consommateurs ont tendance à confondre eau de coco et lait de coco, mais après avoir compris le produit, ils accrochent ».
La guerre est déclarée
Plus que porteuse, la catégorie devient peu à peu incontournable et attire les grands du secteur.
Parmi eux, on peut citer la redoutable entrée en matière d‘Innocent, début décembre, qui se fait sa place au milieu des jus frais en exclusivité chez Monoprix, au prix de vente conseillé de 2,75€ pour 50 cl . L’eau coûte cher !
Vita Coco, leader aux Etats-Unis, avait déjà bien bousculé le marché à son arrivée en 2013, déployant massivement animations et force de vente, bien décidé à faire de la France son nouveau poulain.
La PME Vaïvaï, pionnière de la catégorie en France depuis 2010, guettant le danger, avait ainsi redoublé d’effort en 2015, en investissant à la fois sur deux spots TV et deux campagnes d’affichage en partenariat avec le tennisman Gaël Monfils. Voulant passer à la vitesse supérieure, celle-ci a même, depuis novembre dernier, organisé une levée de fonds de plus de 3,5 millions d’euros auprès de ses actionnaires historiques, pour développer son eau de coco en France et à l’international.
Si Giles Brook, PDG de Vita Coco France déclarait dans LSA début 2015 qu’il y avait « assez d’espace pour tous » et que la concurrence était « nécessaire à la construction de la catégorie », Andy Kay modère aujourd’hui ses propos : « On a aujourd’hui de nombreux acteurs qui investissent. C’est une bonne nouvelle, cela veut dire que la catégorie a réellement son importance. En revanche, je pense que le marché sera amené à se concentrer dans les années à venir à 2 ou 3 grands acteurs. »
La coco, un vivier d’innovations insoupçonné
Face à une concurrence féroce, une seule solution : innover. Un défi d’autant plus grand que le produit est simple et attire de plus en plus de MDD comme Casino et Monoprix.
Vaïvaï multiplie ainsi ses efforts en variant les formats en ambiant comme en frais et en proposant des mix fruités originaux aux superfruits (açai, acérola, et cranberry), rendant le produit plus accessible.
Vitacoco, qui redouble de moyens sur 2016, démarre ce mois-ci avec une eau de coco au café. La marque prépare également une huile de coco bio 100% durable qui devrait sortir courant 2016
Chi, un des derniers arrivés, propose même des variations gourmandes alliant crème de coco, café et cacao : une alternative sans lactose au café au lait et au lait chocolaté qui n’est pas sans rappeler The Coconut collaborativative, un OVNI qui révolutionne l’utra-frais.
Progressivement, les industriels vont ainsi plus loin que la simple « eau de coco » et profitent de la tendance et de la naturalité de la coco pour lancer ses dérivés juteux, devenant des spécialistes de la filière. Bref, la coco n’a pas fini de nous surprendre.
Vers une filière durable
Etant donné l’énorme potentiel de marché, de l’eau de coco comme de ses dérivés, la priorité N°1 des leaders du secteur est devenue la maîtrise de la filière.
Côté Vitacoco, l’objectif est de « renforcer les contrôles qualité, et les liens avec les agriculteurs ». La marque prévoit même de créer une « fondation des cultivateurs Vitacoco » et, à terme, une filière 100% durable et équitable.
Pour Vaïvaï, déjà engagée depuis ses débuts dans la solidarité de sa filière. L’approvisionnement se fait auprès de 8000 familles de fermiers récoltants. Différents programmes d’aide développement, des micros-crédits et des formations ont été mis en place.
Reste à savoir qui des deux leaders l’emportera, sachant que les deux marques sont toutes deux distribuées par la même force de vente, celle de Solinest. A voir si Innocent prendra avantage de cette fenêtre d’ouverture pour se trouver une place, ou si au contraire, la force de vente concurrente, plus étendue, ne sera pas d’autant plus féroce.
Simple et naturel : la recette du succès
Pour rappel, l’eau de coco c’est tout simplement l’eau contenue dans la noix de coco est cueillie verte.
« La force de l’eau de coco, c’est que c’est un produit extrêmement simple à expliquer et à comprendre pour un consommateur »
Andy Kay, Directeur Général France et Benelux de Vita Coco
A ajouter à cela, un marché des boissons sans alcool qui bouge au rythme de deux principales tendances : l’exotisme et la santé.
L’eau de coco était logiquement le combo gagnant. Quelques tartines de SANS (colorant, conservateur, calorie, sucre ajouté) et d’oligo-éléments naturels (du magnésium et « plus de potassium que dans une banane ») et le produit vend déjà du rêve.
Distribuée principalement en snacking, l’eau de coco est aussi bien présente au rayon jus ambiant qu’en frais. Elle se présente ainsi comme « une alternative naturelles aux sodas et jus de fruits sucrés « nous explique Andy Kay.
L’eau de coco, pourtant, ce n’est pas du jus. Mais elle garde le côté exotique tout en étant « quatre fois moins sucré que le jus d’orange« , et en « s’inscrivant totalement dans les tendances de consommations actuelles » souligne Gaëtan Laederich, co-fondateur de Vaïvaï.
Aux Etats-Unis en 2009, le marché pesait 60 millions d’euros. Aujourd’hui c’est plus d’1 milliard. Si la France pèse en 2015 plus de 5 millions d’euros, elle pourrait bien suivre la même courbe d’évolution que son homologue outre-atlantique et atteindre 20 millions d’ici 5 ans, et même 50 millions d’ici l’horizon 2025. L’eau de coco semble d’ores et déjà avoir de beaux jours devant elle.